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Vous ne voulez pas savoir...

Carnets de voyage
de Charles-Isaac-Anne de Rivaz

Printemps 1870

Nous sommes convoqué par Monsieur le Ministre Jules Vernes en personne pour affaire étrange où mes talents seraient de quelque utilité: disparitions au Palais Royal, et éventuellement espionnage. Monsieur Jules Vernes est un homme très impressionnant; sous la carapace de l'Homme d'État qu'il est maintenant, on peut toujours percevoir le formidable scientifique. Remarquable esprit de déduction.

Présenté à plusieurs personnes, chargés de former une équipe d'investigation secrète pour régler cette affaire, qui indispose Sa Majesté:

Sûreté retrouve Souris mécanique. Petite merveille de miniaturisation: mécanisme d'horlogerie spécialement fin, guidé par une combinaison de cylindres contenant les plans des chambres traversées; composantes Magiques au niveau des yeux. Avec Monsieur Feodorov et Mademoiselle de Noailles, nous parvenons à établir des plans précis de la Souris mécanique; yeux peuvent transmettre des images par magie; découvrons une "marque de fabrique" identifiant son concepteur comme un certain "Professeur Cortex".

Cylindre contient plans partiels du Palais Royal; principalement le Salon Bleu, où parfois Sa Majesté l'Empereur vient converser, ainsi que la chambre de Madame Guillemette de Mativor (je crains que mes notes préliminaires ne soient peu claires sur l'orthographe du patronyme de cette personne).

Une enquête de Monsieur le Baron de Raulin nous amène des renseignements nouveaux: jeune scientifique de grande valeur amoureux de Madame de Mativor; porté disparu dans la terrible explosion de son laboratoire; spécialiste dans les mouvements d'horlogerie. Serait-ce le Professeur Cortex?

Je mets au point en vitesse un Détecteur de Champ Volto-Magnétique induit; sensé repérer d'éventuels autres mécanismes tels que la Souris. Premiers tests un peu hasardeux, problèmes de calibrage. Il faudra régler cela.

Découvrons au domicile de Monsieur Jules Vernes -- après, je l'avoue, une intrusion peu légale, même si cautionnée par Mademoiselle de Noailles -- une autre Souris; Monsieur Vernes lui-même semble dans un profond sommeil cataleptique; découvrons la disparition d'une clé spéciale, accédant au poste de commande des Canons Vernes. Au cours d'une de nos réunions, arrive un fort étrange individu, pour tout dire un peu inquiétant; se présentant comme Ezechiel Sombreflau, il est reconnu comme digne de confiance par Monsieur Feodorov, ce qui est plus que ce je puis en dire du premier coup d'oeil.

Grâce à Monsieur Feodorov et à quelques découvertes sur des Souterrains, parvenons à trouver l'entrée d'un tunnel nauséabond et peu engageant; attaqués par d'abominables Araignées Mécaniques, aux croc suintant de poison, ne devons notre salut qu'à la Science Occulte de Monsieur Feodorov, qui conjure une puissante Vague; quelques effets secondaires, sans doute dus à des effets curieux de transfert.

Découvrons l'antre du maléfique Professeur Cortex: grande salle de pierre sous la Ville, encombrée de matériel scientifique; quelques sbires nous opposent une résistance, bientôt vaincue, et nous pouvons délivrer Madame de Mativor; un incendie se déclare, et je puis sauver quelques plans intéressants, notamment des notes sur une Chauve-Souris mécanique fort prometteuse. Nous sortons Cortex de cet Enfer; effectivement le scientifique disparu, cruellement défiguré, sans doute par l'accident; porte un casque qui, aux dires de Monsieur Feodorov, reçoit les informations transmises par les yeux des Souris mécaniques.

Malheureusement, les infâmes commanditaires de cette trahison nous ont précédés et sont en route vers le Poste de Commandement secret de l'Armée Française, où sont situées les commandes de tir des Canons Vernes. Nous parvenons à temps, grâce à l'utilisation providentielle d'une machine volante prototype, baptisée "Hélicoptère", sans doute en l'honneur de l'invention de Maître Léonard de Vinci du même nom. Investissant la tour, nous ne tardons point à retrouver l'espion Prussien et son ignoble comparse français; tous deux périront, l'un sous les balles de Monsieur Sombreflau, l'autre par la lame de Monsieur de Brian-Gondrecourt.

Nous retrouverons le vrai Jules Vernes (l'autre n'étant qu'une sorte de Doppelgänger) dans la demeure de feu le traître, non loin de la tour. Monsieur Vernes nous félicite, tout en nous recommandant la discrétion sur les tenants et aboutissants de cette Affaire, et nous laisse entendre que nous pourrons compter à l'occasion sur son aide et appui éventuels.

Suite à cette Affaire, quelques jours plus tard, me parvient une lettre portant la signature de Monsieur Jules Vernes: celui-ci me propose de faire partie d'un Service Spécial et Secret; je ne peux, face à cette Offre aussi flatteuse qu'inattendue, que répondre par l'affirmative, et ainsi je prends ma plus belle plume et remercie Monsieur le Ministre de l'Honneur qui m'est ainsi fait. Me voici donc au Service -- aussi Secret et indirect soit-il -- de l'Empereur! Une bouffée d'orgueil m'étreint: sachons nous montrer digne de cette confiance!

15 mai 1870

Point de repos pour les Braves, semble-t-il, puisqu'à peine un mois après l'Affaire des Souris et ma subséquente entrée dans le Service Secret du Ministre Jules Vernes, une nouvelle Missive m'enjoint de me rendre à l'Appartement, situé Rue des Écoles, qui nous sert de Quartier Général. Là, à neuf heures précises, j'entre, accueilli par Nestor notre majordome. Germaine et Louisette, les bonnes, sont également présentes pour s'occuper de mes affaires.

Je suis bientôt rejoint par Mademoiselle de Noailles, toujours aussi charmante, ainsi que Messieurs de Brian-Gondrecourt et Feodorov, ainsi que Monsieur Sombreflau qui -- bonne nouvelle! -- a troqué ses hardes contre des vêtements plus seyant à la Société parisienne, mais malheureusement -- mauvaise nouvelle! -- pas la bonne société! Tous, autant que nous sommes, sommes équipés pour, comme le précisait la lettre, passer quelque jours à la Campagne. Monsieur le Baron de Raulin est aussi des nôtres, mais il arrive quelque peu en retard, ce qui est (ce me semble) plus une Affirmation de Style qu'une erreur involontaire de sa part.

Monsieur le Ministre Jules Verne, apparemment bien remis de ses dernières péripéties, est là pour nous accueillir et nous entretenir de la mission que nous nous voyons confiée. Il s'agit pour nous de veiller sur la personne du Professeur Natalia Borovitch, chimiste. D'origine Russe, le Professeur Borovitch semble craindre pour sa Liberté, ainsi que pour sa Vie. Les circonstances de sa venue à Paris restent floue, mais je décide néanmoins de ne pas trop m'aventurer sur les terrains glissants et conjoints de la Politique Internationale et des Sombres Conspirations qui la sous-tendent.

Nous nous rendons donc, par calèche banalisée, dans la Verte Normandie, au nord-ouest de la Capitale, pour rejoindre le très paisible et très rural village de Montfleuri, plus précisément une villa au lieu-dit "La Brise" non loin d'icelui. Nous y arrivons le 17 mai, je suis fort ému: c'est la première fois que je puis voir la Mer, même si elle n'est à cet instant qu'une lointaine ligne turquoise, aux reflets d'argent à l'Horizon. Je ne puis m'empêcher de penser à l'ouvrage d'Hermann Melville Moby Dick, que j'avais lu pendant mes études à l'Académie. Peut-être un jour naviguerai-je aussi...

Mais sur l'instant, ce sont surtout les dispositifs d'emménagement et d'installation qui nous préoccupent. Nous nous devons, outre de nous préparer à rester en ces lieux, mais aussi assurer la Sécurité de Madame le Professeur Borovitch. Du personnel de maison du crû a été dépêché par les bons soins des Services Secrets pour s'occuper des besognes domestiques: deux bonnes, Marie et Fernande, assistent Germaine, la cuisinière. Monsieur le Ministre a aussi cru bon de nous assister d'une escorte de trois policiers, qui répondent tous au patronyme de Dupond, même si semble-t-il l'orthographe diffère; comme en plus ils se ressemblent comme trois frères, mon esprit -- cartésien mais peu physionomiste -- tend à s'embrouiller.

En explorant la demeure, je découvre une pièce au sous-sol qui semble servir de bibliothèque, fumoir, et même laboratoire. Le plafond forme comme une coupole, et certains éléments de décoration me semble curieux. En explorant un peu plus, et avec l'aide de Feodorov qui m'a depuis rejoint, nous découvrons le Secret de l'endroit: un ingénieux mécanisme scientifico-magique (pour autant que je puisse le dire; les connaissances Thaumaturgiques de Feodorov me sont en ces moments fort précieuses) génère une image du Ciel étoilé digne des meilleurs Planetaria du Vieux-Continent. C'est tout émerveillés de cette découverte que nous nous rendons à la salle à manger pour le repas du soir, et pendant lequel nous faisons part de notre découverte à nos compagnons; nous allons jusqu'à leur faire une démonstration du génial dispositif.

Loin de ces considérations, un grave Danger nous menaçait cependant. En effet, ce fut au cours de cette même nuit qui pourtant se promettait sous les meilleurs Augures, que nous fûmes attaqués par une bande de cinq Soudards, emmenés par un Russe; nous en trouverons deux occupés à fouiller la chambre de Feodorov, promptement neutralisés par Sombreflau. Au cours de l'échauffourée qui s'en suivit, nous devions perdre nos trois braves policiers, qui malgré une résistance héroïque et acharnée, périrent sous les coups des sordides Sbires. Quant à ceux de nos Agresseurs qui ne périrent pas par le Fer ou le Feu de notre défense, ils choisirent le Suicide par l'ingestion d'un Poison foudroyant, ce qui nous fait comprendre à quel genre d'Adversaire nous avons à faire.

Seul reste sur place le Russe, que nous parvenons à capturer. Nous apprendrons par Sombreflau, un peu plus tard dans cette même nuit, qu'un autre Personnage, qui attendait ses Sbires dans la forêt voisine, est mort dans ce qu'il appelle un "pénible accident", expression qui ne leurre personne. Nous trouverons aussi des papiers sur les morts et les vivants, notamment des papiers officiels, provenant d'une Capitainerie, et consistant en une Autorisation d'Accostage à Londres et au Havre pour un petit bateau.

Décidément, cette nuit n'en finit pas d'amener son lot d'Événements, puisqu'au matin, nous nous apercevons de l'absence de Feodorov, qui s'avère être entré en catalepsie. Avec l'aide de Sombreflau, nous parvenons après quelques investigations aux conclusions suivantes: Feodorov a mis une bague, que nous ne lui avions jamais vu porter auparavant, et c'est cette bague -- de toute évidence porteuse d'un certain potentiel occulte -- qui l'a placé dans cet état, un état de "Corps Astral" aux dires de notre compagnon. Assez curieusement, il se trouve dans un état similaire à notre prisonnier russe. Il nous faudra une bonne journée d'investigations pour que, de concert avec Mademoiselle de Noailles, nous parvenions à aider Feodorov à sortir de son état. La réponse nous viendra par une série d'Articles de la revue Science Populaire, traitant de la Machine de Réalisme Virtuel de Lady Ada Lovelace. En effet, nous parvenons à mettre en parallèle les Mécanismes Psychiques décrits dans l'article et l'État Altéré de Conscience de Feodorov. Celui parvient donc au bout de quelques heures à sortir de sa Transe, ainsi d'ailleurs que d'en extraire notre prisonnier russe.

Ce dernier dit s'appeler Mikhail Volovitch, de la Police Secrète du Tsar. Il dit avoir été capturé par un Sinistre Individu qui l'a Ensorcelé pour lui faire commettre l'attaque contre notre maisonnée. Feodorov dit le croire et semble se porter garant de sa conduite; et d'ailleurs Volovitch et lui semble avoir beaucoup à se raconter. J'aimerais penser qu'ils ne parlent que de leur lointaine Patrie, mais quelque chose me dit qu'il y a d'autres sujets, moins mondains et plus Occultes dans leur conversation. Dans un domaine moins gai, le Baron de Raulin a la bienveillance de s'occuper de donner Sépulture Décente et Chrétienne à nos trois policiers d'escorte, tombés au Champ d'Honneur. Cela ne va pas sans mal, et il doit ensuite s'occuper de convaincre la Maréchaussée locale de notre bonne foi, chose dont il s'acquitte fort bien d'ailleurs. Nous avons aussi fort à faire pour occuper l'Esprit de Madame le Professeur Borovitch, fort perturbée par ses événements. Par une quelconque Astuce que j'imagine Féerique, Sombreflau lui "remonte le moral", selon ses propres dires. En effet, Madame le Professeur se prend à vouloir détailler les Secrets du Poison qui a tué nos agresseurs précédemment, et parvient d'ailleurs à de forts intéressants résultats.

Le lendemain, le Baron de Raulin et Mademoiselle de Noailles partent pour Le Havre afin, officiellement, d'enquêter sur le bateau (et plus officieusement, sans doute pour le Baron d'exercer ses Talents de séducteur sur Mademoiselle de Noailles) et d'envoyer un message à Monsieur le Ministre Jules Verne, concernant cette Sinistre nuit. Plus tard dans la journée, je remarque un point dans le ciel qui, après examen approfondie à l'aide de différents Appareils Optiques, s'avère être une fort impressionnante Aéro-navette Bavaroise (ce qui en ces temps constitue un fort pléonasme, les Bavarois étant -- fort heureusement -- les seuls à posséder pareils engins). Le majestueux Vaisseau des Airs se stabilise au-dessus du domaine; à son bord, le Ministre lui-même, accompagnés par des Officiers de l'Aéronavale Bavaroise. Nous aidons Madame le Professeur Borovitch à prendre place à bord, et l'Aéro-navette prend rapidement de l'altitude et disparaît dans le ciel, pour une destination qui nous est inconnue.

Notre Mission est donc terminée ce 19 mai 1870, sans trop de mal, ce qui est heureux. Mais cette fois-ci nous avons vu en face de nous, non des soldats, mais de vrais Fanatiques prêts à mourir pour quelque obscure et néfaste Cause. Nos prochains rendez-vous avec l'Aventure pourraient se révéler plus cruels.

Juin 1870

Peu de temps se sont écoulés depuis cette dernière mission, lorsque j'ai la surprise de voir Germaine, la bonne de notre Appartement Officiel, m'apporte à ma boutique un mot pour Monsieur Feodorov. Fait étrange: ce dernier est souvent dans les parages; le fait qu'il ne soit point atteignable immédiatement m'étonne quelque peu. Le message provient d'Ézéchiel Sombreflau, enjoignant Feodorov de le rejoindre au plus vite à la Rose Noire; le message est frappé au sceau de l'urgence.

Il me faut quelques instances pour me remémorer que ladite Rose Noire est un douteux Estaminet, propriété de Sombreflau, individu lui-même peu recommandable aux Âmes bien nées. Remarque qui, cela dit en passant, fait peser de sérieux doutes quand à ma Condition, puisque je décide, nonobstant ma discrétion coutumière, d'aller m'enquérir moi-même de ce qu'il en est auprès de l'Intéressé et sousigné de la missive.

En ce chaud Été, le quartier qui abrite pudiquement la Rose Noire semble encore plus malsain que possible. En plein jour même, on ne se sent guère en sécurité. Ruelles sombres succèdent aux cours sanieuses, et l'on se croit à Mille Lieues du Pairs de ce bon Baron Hausmann; tel est Montmartre. Dire que je ne me sens guère à mon aise dans pareil milieu n'est qu'un sinistre euphémisme. J'atteins mon but avec hâte, et j'y trouve comme il se doit Ézéchiel, à la mine plus sombre encore que son patronyme. Il m'explique qu'il lui est arrivé un Problème.

La chambre dans laquelle Ézéchiel me conduit est de mnauvais goût, comme il sied je présume à une chambre de lupanar (n'ayons pas peur des mots). Elle n'est cependant que le décor secondaire d'un Acte tragique et Atroce: deux corps y gisent, ceux d'une femme et d'un homme; ce dernier est de type étranger, Moyen-Oriental sans doute, quand à la femme, Sombreflau la désigne comme une de ses "filles". De plus, on trouve trace de Rituels Magiques dans la chambre. Plus grave, me dit-il, on a enlevé sa soeur; il soupçonne fortement des Agents d'un Ordre ou d'une Société ennemie de celle de Feodorov d'avoir fait le coup pour récupérer une Bague qui, semble-t-il, est en la possession de notre compagnon russe.

Cette affaire ne concerne donc pas seulement Ézéchiel et Feodorov, mais bien notre Équipe au grand complet; je propose donc de battre le rappel des Troupes, avis auquel se rallie sans mauvaise grâce Sombreflau. Après quelques recherches infructueuses, Madame de Noailles notamment étant fort occupée par quelque Découverte, nous parvenons à joindre Monsieur le Baron de Raulin à son Club d'escrime. Il nous présente une connaissance, un certain Guillaume de la Fransière, aimable gentilhomme au Service de l'Empereur, qui semble lui aussi intéressé par Monsieur Feodorov, pour des questions d'Enseignement me semble-t-il.

Il nous faut un certain temps pour retrouver où logeait feu l'Oriental (nous apprendront plus tard son nom: Nascar de Thèbes), mais un des multiples contactsde Sombreflau vient à point nommé pour nous indiquer sa Chambre, dans un hôtel borgne des environs de la Rose Noire. Si la serrure ne nous pose aucun problème, il n'en est pas de même des pièges tendus par l'ex-Occupant des lieux, et le Baron comme moi-même nous voyons, à notre grand Effroi, paralysés par un obscur et délétère Venin. Ézéchiel parvient en renfort à nous extirper de cette malencontreuse posture, et nous retrouvons peu à peu nos esprits dans une chambre accueillante et moins tape-à-l'oeil de la Rose Noire.

C'est alors que survient un Personnage fort étonnant. Il dit s'appeler Francisco de la Vega, sujet Espagnol et supérieur de Feodorov. L'Histoire qu'il nous narre est des plus inquiétante: nos Adversaires sont des membres du Temple de Râ, ou tout au moins de sa branche égyptienne. Il semble en effet que cet Ordre ait connu une forme de Scission, où les factions britanniques et égyptiennes se livrent une Lutte sans merci pour la possession d'un terrifiant Artefact: le Bâton de Râ. Cette possession passe par dix Bagues, chacune d'elle ayant un fragment de la Carte qui indique l'emplacement secret du Bâton.

Il nous faut donc, avec l'Approbation de Monsieur le Ministre Jules Verne, partir pour l'Angleterre et y rencotrer Lady Ada Lovelace, génie -- le mot n'est pas trop fort! -- des Mécanismes Logiques en même temps qu'Adversaire du Second Pacte. Par un Hasard étrange, nous serons peut-être du même côté, pour cette fois. Cela dit, des Agents Prussiens sont aussi sur place; notre Tâche sera rude!

Londres

Sur ces entrefaits, nous avons l'agréable surprise de trouver Monsieur de Brian-Gondrecourt à notre Quartier-Général peu avant notre départ. Il ne nous est guère difficile de le convaincre de nous accompagner. Monsieur le Ministre Jules Verne nous donne ses ultimes instructions et, ce faisant, nous donne ses lettres de créances. Quelle n'est pas ma surprise de m'entendre nommé Ambassadeur Extraordinaire de Monsieur le Ministre! L'honneur est immense et, pour tout dire, me pèse quelque peu; je perçois l'irritation du Baron de Raulin, qui pense sans doute être plus à même de s'acquiter de ce Rang, et un instant l'idée me traverse de le lui laisser bien volontiers. Je me reprends assez vite: si Monsieur le Ministre m'a choisi moi, c'est qu'il a sans doute ses raisons, qu'il me considère comme digne de porter cet honneur; il est donc de mon devoir de me montrer à la hauteur de la Charge qui m'incombe.

Nous prenons donc l'Aéronavette Bavaroise qui relie Munich au Nouveau Monde, via Paris et Londres; en un temps fort court, nous survolons la Manche et nous posons non loin de la Capitale britannique. Le paysage qui nous y attend n'est guère accueillant. Ayant lu à mes heures perdues les récits du Major Tom Olam -- celui que les journalistes ont nommé "L'Homme qui venait d'Au-Delà du Voile Féerique" --, je ne peux que frissoner en repensant à ses descriptions terrifiantes du Monde d'où il dit venir, un Vingtième Siècle qui pour nous semble encore lointain.

Mon Dieu! Que sommes-nous si proches, et pourtant si éloignés de Paris la Ville-Lumière! Tout ici est gris: paysages, maisons, et même les enfants! Point de rires, point de fleurs: juste de la pierre, des briques. Une imposante fumée noirâtre hante le ciel.Assis dans notre fiacre, nous regardons, interdits, ce paysage de Cauchemar qui défile; ainsi voilà le pays des Barons de la Vapeur! Londres est au demeurant plus accueillante. Les rues où nous passons sont propres, les gens bien habillés. Très bien, même; trop bien au regard de la Misère. Jamais n'ai-je eu en ce moment une telle conscience de mes Privilèges d'homme libre, et une telle honte. Mais il nous faut nous ressaisir et chercher à retrouver Lady Ada Lovelace, ainsi que Feodorov.

Je décide de compulser les Gazettes locales, histoire de trouver des indices et de dérouiller mon Anglais; j'y découvre les détails de l'Enlèvement de Lady Lovelace, et la mention que Lord Byron aurait confier l'enquête à un jeune Investigateur du nom de Sherlock Holmes; voilà qui est pour le moins étonnant et preuve de la valeur potentielle de cet individu.

Les heures passent ma foi bien vite; je pense être abîmé dans ma lecture que quelques poignées de minutes, et ce sont plusieurs heures qui se sont écoulées. Voilà d'ailleurs que nous revient Sombreflau, porteur d'importantes nouvelles. En ses termes pour le moins fleuris, il nous narre avoir découvert un bateau, le Sphynx d'Égypte, autour duquel tournaient deux étranges personnages: un Nain et une jeune femme, fort bien vêtue aux dires de Sombreflau, qui d'ordinaire ne s'intéresse peu à la mode fémininbe, mais plutôt à ce qu'il y a dessous. Ce Sphynx semble détenir la clé de bien des Mystères, puisqu'il me revient qu'il s'agissait du même Navire impliqué lors de l'Attaque contre notre maisonnée en Normandie précédemment. Quoi qu'il en soit, Ézéchiel claironne avoir découvert la demeure où résident les Ravisseurs de Feodorov -- et peut-être aussi ceux de Lady Lovelace. Il nous parle d'un Manoir hors de la Ville, loué par une "Société des Amis de l'Égypte"... Il dit y avoir retrouvé Feodorov, enfermé dans une Cave, et même lui avoir parlé.

Il ne nous en faut pas beaucoup plus pour partir, ayant pour l'occasion revêtu nos Tenues de circonstance. Las! Tous nos efforts de discrétion s'avèrent vain, lorsque nous découvrons la propriété en proie à une Excitation inusitée à pareille heure de la Nuit. Il semblerait que notre cher Feodorov ne nous ait pas attendu pour s'extraire de son Cachot d'infortune, et que son évasion soit la cause du remue-ménage régnant. Nous passons le mur d'enceinte et une trop mince forêt, pour être quasi-instantanément Découverts!

Des coups de feu éclatent dans la Nuit où s'agitent des candélabres de gardiens Hostiles. Une douleur fulgurante me traverse la jambe: je suis touché! Douleur intense, mais passagère. Une ruée d'adrénaline noie le traumatisme et mon esprit s'éclaire. Malgré ce Handicap, je pense clairement et me dirige du mieux que je peux vers la maison, sabre au clair. Autour de moi, Compagnons et Adversaires sont engagés dans une sarabande mortelle qui semble se dérouler au ralenti. Je vois Ézéchiel aux prises avec une Fée qui lui ressemble étrangement; de la Fransière virevolte avec l'aisance d'un Homme d'Armes.

Le combat cesse aussi soudainement qu'il avait débuté: les derniers Ennemis refluent vers la maison, laissant à leurs sbires -- au regard curieusement absent -- le soin de nous retarder. Un souffle rauque venant du toit nous apprend qu'une Montgolfière s'apprête à décoller, et tous nos efforts resteront vains pour l'en empêcher. Le silence retombe. Malgré ma blessure, je ne suis pas fatigué. Une sombre excitation m'emplit encore, et même de nouveau; je sens qu'il y a encore quelque chose à faire ici. Mais mes sens me trompe, et c'est l'ouïe fort exercée de Monsieur de la Fransière qui me guide vers un Sombre Recoin de la cave, où des chocs sourds se font entendre, au-delà d'un Mur hâtivement scellé. Derrière, c'est une autre vision Atroce qui nous attend: Lady Ada Lovelace, le regard perdu, la tête en sang à force de la cogner contre les murs de sa prison, abandonnée du Monde par ses cruels Ravisseurs. Nous la délivrons et refluons en toute hâte vers Londres, à la recherche d'un Médecin. Je glisserai rapidement sur les chausses rebondies de certains de mes compagnons, dont la rapacité en ces instants m'écoeure quelque peu.

Nous trouvons un homme de médecine susceptible de nous aider. Je le prie de se pencher sur le cas Inquiétant de Lady Lovelace, pendant que Monsieur le Baron de Raullin se charge de prévenir Lord Byron, père de la Malheureuse. Mais le sort s'acharne: si les blessures de la jeune femme sont physiquement superficielles, son Esprit est prisonnier d'un abîme indicible. Aux dires de Feodorov, qui connaît la chose pour l'avoir expérimentée et qui a tenté de recontacter Lady Lovelace, seule sa Machine de Réalité Virtuelle peut la faire Revenir. Or, celle-ci a été détruite par les Ravisseurs, et les plans emportés.

Alors que je songe et planifie, le regard quelque peu inquiet de mes Compagnons me pousse à accepter que le médecin panse la Blessure que j'ai à la jambe. Ce n'est pas la plus grave: je pense à une autre blessure faite à mon amour-propre. Nous avons remporté une Victoire certes, mais une victoire pyrrhique, amère. Notre prochain objectif est de pouvoir reconstituer la Machine et ainsi ramener Lady Lovelace dans le monde des Vivants.

Page de départ

Charles-Isaac de Rivaz et ses carnets de voyage

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Lorsque l'Afrique s'éveilla

Symphonie immortelle

Commentaires: Stéphane "Alias" Gallay -- Ou alors venez troller sur le forum...